Mettant en scene un panache d’acteurs (Kristin Scott Thomas, Yvan Attal, Sergi Lopez), Catherine Corsini signe avec Partir un drame passionnel. En affirmant avoir melange ses lectures romanesques d’adolescente aux films de Chabrol et Truffaut, la realisatrice a filme la sensualite a la frontiere espagnole
Lepetitjournal.com : En tant que cineaste, est-il difficile de raconter une histoire d’amour ? Est-ce un defi de s’y confronter ? Catherine Corsini : Je trouvais que j’etais a l’age ou j’avais decide d’abandonner les passions pour vivre quelque chose de plus constructif, donc j’avais le recul necessaire pour parler de l’amour, de la passion, des etats dans lesquels ca nous met, du cote jusqu’au-boutiste et parfois devastateur que ca peut avoir, et en meme temps de l’aspect revigorant, magnifique et splendide de la passion.
Pourquoi avoir choisi un trio mari, femme, amant ? Pour la dimension romanesque ou parce que cela fait parti des histoires de tous les jours ? Dans les tragedies de toute facon ou dans les histoires d’amour, il y a toujours un empechement et generalement c’est quelque chose de sociale, souvent representee par le mari, celui qui detient l’argent, et c’est assez classique comme on le voit deja dans les romans du XIXeme siecle : la femme se doit de rester, ou la femme n’a pas les moyens de partir? Et je trouve qu’aujourd’hui, meme si nous vivons dans une societe evoluee, nous ne sommes pas si loin de ces schemas “anterieurs”.
Vous pensiez a Kristin Scott Thomas lors de l’ecriture du scenario. Pourquoi vous a-t-elle inspire ? Cela faisait longtemps que je voulais travailler avec elle;je trouve qu’elle a une beaute plastique que peu d’actrices ont. Alors qu’elle a 48 ou 49 ans, elle reste une femme extremement belle;elle a un cote presque hitchcockien qui fait que meme une histoire “banale”, peut-etre un peu ordinaire, prend tout de suite une dimension cinematographique. Justement grace a elle, je ne voulais pas tomber dans un film realiste ou la tristesse et la banalite aurait ete accentuees, mais bien plutot, je voulais montrer que l’histoire reste exceptionnelle. Et je trouve que Kristin a ce cote rare;il y a peu d’actrices francaises qui ont ce cote-la.
Sergi Lopez et Yvan Attal ont-ils un charisme comparable ? Chacun a quelque chose de tres different;Sergi a ce cote rassurant et populaire que je cherchais pour le personnage : rien qu’avec un sourire, il vous cueille ! Yvan, je trouve qu’il allait tres bien avec le cote un peu agressif, sournois? C’est un acteur complexe, il peut tout jouer;j’etais sure que le fait de jouer un “mechant”, un mec un peu odieux mais en meme temps depasse par ses sentiments, je savais qu’il aurait le plaisir, l’humilite de jouer ce role.
Au debut, ma productrice n’aimait pas du tout l’histoire et ne voyait pas du tout ce que j’allais en faire.
Donc ca a ete un defi de la convaincre, puis ensuite les chaines de TV ne voulaient pas investir dans le film, donc ca m’a fait douter du scenario et je l’ai affine. Mais au final, l’histoire n’a pas beaucoup change et je suis assez restee sur le fil de ce que je voulais raconter.
Comment expliquez-vous les doutes de votre entourage par rapport au scenario ? Les gens trouvaient que c’etait conventionnel, que c’etait deja-vu. Ils ne se rendent pas compte qu’ils ne font pas confiance aux cineastes, ils ont envie de sujets originaux et puis souvent dans les sujets originaux, ils se plantent completement. Je pense qu’il y a une grande frilosite aujourd’hui en France et en Espagne aussi (puisque qu’en Espagne on cherchait une coproduction que l’on a failli avoir, et puis finalement les chaines non plus voulu du film). La rancon c’est que le film a tres bien marche en France, j’espere qu’il marchera aussi bien en Espagne. Donc du coup, ca a prouve que j’avais raison et qu’eux avaient tort. Avec le fait de vouloir plaire au public, il y a un devoir de rentabilite et du coup les gens font les mauvais choix, se plantent, car ils ont l’impression que c’est un sujet qui a deja ete vu, mais pourtant chaque cineaste amene un point de vue different sur un sujet meme classique et c’est ca qui fait que les films sont interessants.
Tandis que Kristin Scott Thomas incarne la grace a l’anglaise, Sergi Lopez n’adopte pas le cliche un peu bete d’un Casanova a l’espagnole;il apparait tranquille, serein? Ces deux nationalites ont-elles apporte au film quelque chose en particulier ? C’etait tres etrange au depart. Le premier jour ou j’ai tourne avec eux, j’ai eu tres tres peur https://datingmentor.org/fr/polish-hearts-review/, j’ai pense que ca n’allait pas fonctionner, qu’ils etaient deux planetes. J’etais tres inquiete car j’ai eu peur de m’etre trompee. Je sentais qu’ils ne jouaient pas du tout de la meme maniere;il y a eu beaucoup de temps pour qu’ils arrivent a s’accorder. En plus, on a commence par des scenes particulierement difficiles que j’ai eu tout de suite envie de refaire. Finalement j’ai joue sur elle [ndlr. Kristin Scott Thomas], sur son cote qui a peur d’y aller, qui est reticente, parfois un peu raide. Et lui, sur le cote attentif, curieux, ouvert? Puis les choses se sont passees progressivement. A cote de ca, j’ai trouve genial d’etre perdue dans les montagnes avec une actrice internationale, un acteur espagnol? Ca a retire quelque chose de quotidien au film, ca lui a amene une autre dimension. Je ne sais pas si c’est dans mon imaginaire ou dans ce qu’ils portent.
L’Espagne est-il un pays qui vous attire en particulier ?
J’avais envie d’aller vers un endroit que je ne connaissais pas tres bien. Et peut-etre que c’est le fait de ne pas connaitre, ce cote premiere fois qui m’a plu. Lorsque l’on a ete en Catalogne, j’ai trouve la decouverte des paysages tellement magique que je pense que c’est ce qui a amene la simplicite des decors. Cela a apporte au film. En tout cas, j’ai tourne la-bas car c’etait vraiment un coup de foudre. Sur ce film, j’ai trouve des decors tres vite. Il y avait vraiment une evidence a chaque fois;c’etait la et pas ailleurs.
Dans le contexte social du film et sa dimension un peu feministe, y aurait-il une morale engagee a retenir de l’histoire ? C’est plutot ambigu car les vraies feministes trouvent que le film ne l’est pas dans la mesure ou la femme est punie. Donc il y a plutot une morale de la culpabilite, a la judeo-chretienne, j’appartiens toujours a la generation qui n’en est pas liberee. Mais dans tous les cas je pense que ca a le merite de prendre en compte le fait que les femmes soient encore sujettes a des difficultes financieres que parfois n’ont pas les hommes et bien souvent, elles ne sont pas reconnues dans leurs droits. Des gens m’ont dit : ” oh mais ca ne se passe plus comme ca maintenant “, mais j’ai encore eu recemment la preuve de ce qui est dans le film?